Des lycéens invités à débattre de l’immigration en Europe

“Exilés”, un documentaire pour éclairer les consciences

A l’invitation de la Maison de l’Europe Le Mans-Sarthe et en partenariat avec le Cinéma Les Cinéastes du Mans, 140 lycéens sont venus débattre des questions migratoires et de la politique européenne le jeudi 4 octobre 2018.

Pour débattre d’un tel sujet, il est important de prendre le temps de poser ses mots et de poser son regard. C’est exactement ce qu’à fait Margaux Chouraqui avec “Exilés”. Grand reporter de profession et notamment passée par l’émission “C dans l’air” sur France 5, la réalisatrice a tourné ce film documentaire en un mois seulement, à l’automne 2016. “En général, les Européens ne sont pas assez écoutés, d’autant plus quand il y a des crises”. C’est donc caméra au poing et micro en main que la réalisatrice a effectué la route de Paris jusqu’à la frontière turque.

A la suite de la projection du documentaire, les lycéens ont pris le temps de questionner Margaux Chouraqui sur les conditions de ce tournage (“Avez-vous été empêchée de tourner des images à un moment donné ?” – “Aviez-vous un traducteur ?” – “Comment avez-vous choisi les intervenants ?) avant de se lancer plus concrètement sur les questions migratoires.

Pourquoi avez-vous fait ce voyage ?

“Ce sujet me semble important. J’ai toujours voyagé lorsque j’étais grand reporter et ce sujet me tient à coeur. Ce voyage m’a marqué notamment au niveau de la frontière entre la Turquie et la Bulgarie. Ici, les policiers me montraient fièrement qu’un mur anti-migrants était en construction. Ce mur suit un tracé à même le sol. Ce tracé, c’est celui de l’exact emplacement où se situait le rideau de fer (frontière datant de la Seconde Guerre mondiale longue de plusieurs milliers de kilomètres faite d’ouvrages bétonnés, de fossés, de barbelés, d’alarmes électriques et d’installations de tirs automatiques). Alors qu’on l’a abattu bien des années plus tôt, on en érige un nouveau.C’est totalement antagoniste.”

Quelles sont les solutions pour accueillir les migrants ?

“Je n’ai pas de solution à proposer pour l’accueil des migrants. Bien sur, cela coûte cher surtout dans une Europe qui fait face aux crises migratoire et économique. En Grèce et en Italie, la situation est difficile. Comment voulez-vous demander à des personnes d’accueillir des migrants quand eux-mêmes ont des fins de mois difficiles et qu’ils peinent à se nourrir. Principalement, je pense qu’il ne faut pas renier nos valeurs. Regardez en Italie ; avec ces nouvelles personnes de nombreux villages arrivent à relancer l’artisanat local disparu depuis longtemps maintenant.”

Quelle rencontre a été la plus marquante dans votre voyage ?

“Sans hésiter c’est la vieille femme bulgare dans le film qui se souvient de l’époque soviétique où les citoyens étaient encouragés à faire de la délation (cf : elle expose fièrement devant la caméra un diplôme décerné par les soviétiques pour avoir dénoncés de jeunes migrants dans les années 1980). Pour cette délation, elle a obtenu de l’Etat russe un diplôme et des vacances payées par le gouvernement.”

Y a-t-il un but politique derrière votre film ?

“Voici mon parti pris : je suis pro-européenne et pro-réfugiées mais surtout humaniste. On ne peut pas leur fermer la porte alors que nous même nous avons fuit dans le passé. Ce n’est pas simple d’accueillir mais en 2015, il y a eu en Europe 1 million de réfugiés alors que… dans le même temps nous sommes 500 millions de citoyens européens. C’est très peu pour notre grand continent.”

Comment résumeriez-vous en une phrase le message principal de “Exilés” ?

“Surtout il ne faut pas oublier d’où l’on vient pour construire notre avenir européen ensemble.”

Article publié le 16/10/2018